Compte-rendu de la réunion du 24 août 1962

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OUVROIR DE
LITTERATURE
POTENTIELLE

Circulaire n°24

Réunion du 24 août 1962

(dans la salle à manger de la Régence)

PRESENTS : BENS, DUCHATEAU, LE LIONNAIS, LESCURE, QUENEAU.

Excusés : Les autres.

PRESIDENT : LE LIONNAIS.

La pluie nous ayant chassé des jardins, nous nous retirons à l’abri.

Queneau présente des documents sur les écrits lipogrammatiques, des remarques de M. Balestra sur les cent mille milliards de poèmes, ainsi qu’un poème isovocalique sur « le vierge, le vivace, etc… »

(Voir annexes  )

LE LIONNAIS : On peut faire des isomorphismes et transformer des poèmes préexistants d’un bout à l’autre.

BENS : J’admire, parce que j’ai essayé les isovocalismes et j’ai pu constater que c’est très difficile. Il y a des verbes insolubles.

QUENEAU : Mais je crois que notre bon Mallarmé est parfaitement potentiel.

Le Lionnais présente alors un poème holorime « à répétition ».

(Voir annexes  )

Le Lionnais propose alors de composer un poème tangent à trois poèmes tangents deux à deux. Cela se rapproche du problème d’Apollonius (trois sphères plus une). Les conventions à utiliser sont les suivantes :

  • Inscrire un poème non dans un rectangle mais dans un cercle
  • On appellera « bords » du poème : le premier et le dernier mot de chaque vers, ainsi que le premier et le dernier vers
  • Il y a tangence quand les bords des deux poèmes ont un mot commun

On discute pour arriver à comprendre. On y parvient. On souhaite de nouveaux contacts avec M. Quemada.

LE LIONNAIS : Il nous faudrait un inventaire des « bords » de la littérature française.

BENS : Comment fera-t-on avec le théâtre en vers ? La tirade est-elle un poème ?

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    LE LIONNAIS : Cela dépend : oui si elle fait un tout. Exemples : le songe d’Athalie, les Stances de Rodrigue.

    QUENEAU : Pour que le problème soit intéressant, il faudrait faire en sorte que le 4ème poème (celui qui est à composer) soit La Jeune Parque.

    BENS : On pourrait essayer avec trois vers, plus un.

    LE LIONNAIS : Ce n’est pas sérieux.

    BENS : C’est un exercice.

    LE LIONNAIS : Un exercice à dissimuler !

    LE LIONNAIS : J’envisage des poèmes anaglyphiques, à lire avec des lunettes rouges et vertes. Et même des poèmes à quatre dimensions.

    QUENEAU (la bouche pleine) : Ch’est quand même métrique, et non topologique. Il faut écrire des vers de la même dimension, sinon ils ne seront pas tangents.

    LE LIONNAIS : Il y a une métrique des bords. L’intérieur est sans importance.

    BENS (entre ses dents) : Hypocrite.

    LE LIONNAIS : J’ai l’intention, d’ailleurs, de proposer l’étude des séquences/sécances, et notamment des cordes dans les figures.

    BENS : Il nous épuisera.

    LESCURE (pensif) : Il y a tout de même quelque chose à faire dans le poème évidé.

    QUENEAU : C’est l’œuf de Colomb : on met sa mouillette, il ne reste que le bord.

    (Intermède : deux répliques de « Landru »)

    On reparle de M. Florkin et de Liège. Il y eut des échanges de correspondance. On attend.

    Considérations nombreuses sur le jeu d’échecs.

    Prochaine réunion le 14 septembre 1962.

    J.B.

    Texte

    OUVROIR DE
    LITTERATURE
    POTENTIELLE

    Circulaire n°24

    Réunion du 24 août 1962

    (dans la salle à manger de la Régence)

    PRESENTS : BENS, DUCHATEAU, LE LIONNAIS, LESCURE, QUENEAU.

    Excusés : Les autres.

    PRESIDENT : LE LIONNAIS.

    La pluie nous ayant chassé des jardins, nous nous retirons à l’abri.

    Queneau présente des documents sur les écrits lipogrammatiques, des remarques de M. Balestra sur les cent mille milliards de poèmes, ainsi qu’un poème isovocalique sur « le vierge, le vivace, etc… »

    (Voir annexes  )

    LE LIONNAIS : On peut faire des isomorphismes et transformer des poèmes préexistants d’un bout à l’autre.

    BENS : J’admire, parce que j’ai essayé les isovocalismes et j’ai pu constater que c’est très difficile. Il y a des verbes insolubles.

    QUENEAU : Mais je crois que notre bon Mallarmé est parfaitement potentiel.

    Le Lionnais présente alors un poème holorime « à répétition ».

    (Voir annexes  )

    Le Lionnais propose alors de composer un poème tangent à trois poèmes tangents deux à deux. Cela se rapproche du problème d’Apollonius (trois sphères plus une). Les conventions à utiliser sont les suivantes :

    • Inscrire un poème non dans un rectangle mais dans un cercle
    • On appellera « bords » du poème : le premier et le dernier mot de chaque vers, ainsi que le premier et le dernier vers
    • Il y a tangence quand les bords des deux poèmes ont un mot commun

    On discute pour arriver à comprendre. On y parvient. On souhaite de nouveaux contacts avec M. Quemada.

    LE LIONNAIS : Il nous faudrait un inventaire des « bords » de la littérature française.

    BENS : Comment fera-t-on avec le théâtre en vers ? La tirade est-elle un poème ?

    LE LIONNAIS : Cela dépend : oui si elle fait un tout. Exemples : le songe d’Athalie, les Stances de Rodrigue.

    QUENEAU : Pour que le problème soit intéressant, il faudrait faire en sorte que le 4ème poème (celui qui est à composer) soit La Jeune Parque.

    BENS : On pourrait essayer avec trois vers, plus un.

    LE LIONNAIS : Ce n’est pas sérieux.

    BENS : C’est un exercice.

    LE LIONNAIS : Un exercice à dissimuler !

    LE LIONNAIS : J’envisage des poèmes anaglyphiques, à lire avec des lunettes rouges et vertes. Et même des poèmes à quatre dimensions.

    QUENEAU (la bouche pleine) : Ch’est quand même métrique, et non topologique. Il faut écrire des vers de la même dimension, sinon ils ne seront pas tangents.

    LE LIONNAIS : Il y a une métrique des bords. L’intérieur est sans importance.

    BENS (entre ses dents) : Hypocrite.

    LE LIONNAIS : J’ai l’intention, d’ailleurs, de proposer l’étude des séquences/sécances, et notamment des cordes dans les figures.

    BENS : Il nous épuisera.

    LESCURE (pensif) : Il y a tout de même quelque chose à faire dans le poème évidé.

    QUENEAU : C’est l’œuf de Colomb : on met sa mouillette, il ne reste que le bord.

    (Intermède : deux répliques de « Landru »)

    On reparle de M. Florkin et de Liège. Il y eut des échanges de correspondance. On attend.

    Considérations nombreuses sur le jeu d’échecs.

    Prochaine réunion le 14 septembre 1962.

    J.B.

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